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Les adieux des Ivoiriens à HKB, promoteur de l’ivoirité politique

Les obsèques de Henri Konan Bédié ont débuté. Les Ivoiriens de tous les bords continuent de lui rendre hommage avant son enterrement prévu le 2 juin.

Décédé le 1er août 2023, à l’âge de 89 ans, Henri Konan Bédié fut président de la République de Côte d’Ivoire après la mort du père de la nation ivoirienne de décembre 1993 à décembre 1999. Mais auparavant, il fut président de l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire de décembre 1980 à décembre 1993. Il a, en effet, marqué positivement la vie politique ivoirienne. Il a été président du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire PDCI, le parti politique fondé par Felix Houphouet Boigny. Jeudi une messe a été célébrée à la cathédrale saint Paul d’Abidjan à laquelle a pris part le couple présidentiel, Monsieur et Madame Ouattara. Le lendemain, vendredi, c’est au palais de la République que l’hommage de la nation a eu lieu. Plusieurs personnalités, dont Simone Gbagbo ancienne première dame de Côte d’Ivoire, y ont pris part.

Qu’est-ce que les Ivoiriens retiennent de Henri Konan Bédié ?

A les écouter et à lire leurs témoignages, c’est son calme ! HKB, comme on l’appelait en abrégé, a été victime de beaucoup d’injustices dont le plus affligeant a été le coup d’Etat militaire de décembre 1999 perpétré par le général Robert Gueï. Mais le nom Henri Konan Bédié a été affilié au concept d’ivoirité qui, semble-t-il, a fait beaucoup de mal à une partie d’Ivoiriens dont le président actuel, Alassane Dramane Ouattara.

L’ivoirité ?

Le concept d’ivoirité est apparu en 1945 à Dakar dans un cercle d’étudiants ivoiriens. A la base, c’est un concept idéologique qui associe : identité culturelle, souveraineté et créativité. Quelques auteurs qui ont travaillé sur le sujet indiquent que l’ivoirité est un concept qui vise à définir la nationalité ivoirienne dans un processus de démocratisation et d’unification nationale d’une société en manque d’imaginaire « globalement national ». Il s’appuie sur des notions culturelles et vise à promouvoir les cultures et productions nationales.

Ce concept, a par la suite, été aussi utilisé sur le plan politique…

Le mot est employé d’abord par le président Henri Konan Bédié en 1993. Il met en place le concept selon lequel une personne serait ivoirienne seulement si ses quatre grands-parents sont nés en Côte d’Ivoire. Une telle manière d’apprécier les choses a permis d’écarter son opposant d’alors, Alassane Dramane Ouattara. Nous sommes dans un contexte de crise économique, où les ressortissants du Nord de la Côte d’Ivoire assimilés aux travailleurs burkinabés, maliens, etc. présents en nombre lors de la « fièvre du cacao » étaient rejetés par une partie de la population avec la crise de la filière. Le concept d’ivoirité était alors utilisé comme discrimination envers les nordistes. Il allait devenir un point majeur de rejet dans la lutte pour le pouvoir en Côte d’Ivoire.

A part Henri Konan Bédié, d’autres acteurs politiques ont aussi utilisé le mot

Le leader du Front populaire ivoirien FPI, Laurent Gbagbo s’empare également de l’ivoirité tant pour, dit-on, exploiter le rejet des étrangers que pour rejeter la concurrence de Ouattara. Evidement, c’est un point de vue des détracteurs du président Gbagbo. C’est en tout cas ce qui se perçoit en filigrane dans un article de Francis Akindes, publié dans la revue Africaine de sociologie en 2003 intitulé, Côte d’Ivoire : Socio-Political Crises, Ivoirité and the Course of History. D’autres intellectuels ivoiriens ou d’ailleurs sont convaincus que le concept d’ivoirité a été à l’origine de la crise ivoirienne de 2010. A tort ou à raison, l’on a imputé à Henri Konan Bédié, la responsabilité d’avoir utilisé un concept, à l’origine culturel, pour en faire un instrument de lutte politique. L’homme s’en va en laissant entre les mains de Tidjan Thiam l’avenir du PDCI et à tous les Ivoiriens un ennemi commun à combattre : l’ivoirité qui a fait tant de mal à une partie de la communauté nationale.

Pierre Boubane

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Par : Boutros

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