Les autorités de transition malienne ont interdit les activités des ONG soutenues par la France, lundi 21 novembre. Une mesure consécutive à la décision du gouvernement français de suspendre son aide publique au développement en faveur du Mali. Quels sont les enjeux de cette décision lourde de conséquences ?
La nouvelle a fait l’effet d’un coup de tonnerre. Les autorités maliennes ont décidé le lundi 21 novembre, d’interdire avec effet immédiat, les activités de toutes les organisations non-gouvernementales financées ou soutenues par la France. Cette mesure touche même les ONG qui interviennent dans le domaine humanitaire.
Quelle est la goutte d’eau qui a fait débordé le vase ? A travers un communiqué diffusé sur les réseaux sociaux, le Premier ministre par intérim, le colonel Abdoulaye Maïga, motive cette décision par la suspension de l’aide publique au développement à destination du Mali.
Le Quai d’Orsay avait justifié sa décision par le fait que les autorités maliennes collaborent activement avec le groupe paramilitaire russe Wagner, accusé par l’occident de perpétrer de graves violations de droits de l’homme.
L’interdiction des activités des ONG bénéficiant des financements français au Mali était plus ou moins prévisible quand on se rappelle le désamour entre la junte au pouvoir et la France. Après que l’ambassadeur français ait été déclaré persona non grata et le départ du dernier soldat du Mali en août dernier ou les diatribes contre la France aux Nations Unies, on voyait venir cette décision.
La posture de Bamako, aussi souveraine qu’elle soit aura des lourdes conséquences dans le vécu des Maliens. Le Mali, 184e au classement de l’indice de développement humain, est un pays fragile, sujet à une crise politique et humanitaire grave. A titre illustratif, 7,5 millions de Maliens avaient besoin d’assistance, « soit plus de 35 % de la population ».
Nous osons croire que le colonel Assimi Goïta et son gouvernement sont conscients de cet état de fait et s’assument en toute souveraineté. En diversifiant sa coopération et en renforçant l’axe Bamako-Moscou, sûrement qu’il s’est entouré de toutes les garanties nécessaires pour combler le gap qui sera laissé par les financements français.
Le Président guinéen, Sekou Touré, en opposant un non historique et retentissant à la France en 1958, a assumé même dans la douleur, les conséquences de son acte politique tout en restant digne. Aux antipodes du Guinéen, le Président rwandais Paul Kagamé, a eu des moments de frictions diplomatiques frisant la rupture avec la France et a fait entrer son pays dans le Commonwealth. Mais cela ne lui a pas empêché de maintenir une coopération gagnant-gagnant et décomplexée avec Paris.
A chaque homme d’Etat ses choix. Assimi Goïta suivra-t-il Sékou Touré, Paul Kagamé ou tracera-t-il sa propre voie ? Pourvu que les intérêts supérieurs des Maliens soient préservés.
Frédéric Mbaïdedji