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L’Union Européenne lance le Plan d’Investissement Externe

Le 14 septembre 2016, la Commission de l’Union Européenne a proposé un Plan d’Investissement Externe (PIE) dont l’objectif principal est de soutenir l’investissement en Afrique et dans les pays voisins de l’UE. A travers ce nouvel instrument de coopération, l’UE entend impliquer davantage le secteur privé afin qu’il participe au financement du développement durable et inclusif de ces régions.

En Afrique, particulièrement au Tchad, l’UE est devenue le plus grand partenaire d’aide au développement public et du secteur privé. En effet, elle fournit l’essentiel des financements du Tchad à travers divers mécanismes et instruments de coopération dont le 11ème Fonds Européen de Développement (FED) actuellement en vigueur. Les secteurs économiques et sociaux ainsi que le domaine des réfugiés sont les principaux bénéficiaires des appuis conséquents du FED. En juin 2016, elle a mis en place le Plan d’Investissement Externe (PIE) comme nouvel instrument de coopération pour la mobilisation des financements en faveur des Etats et des entreprises privées. Le PIE s’inscrit dans un cadre plus large adopté par l’UE.

L’UE, partenaire stratégique pour le Tchad

Les raisons qui ont amené l’UE à proposer ce nouvel instrument de financement du développement sont induites par le contexte économique, politique et social extrêmement précaire dans lequel évoluent les Etats africains partenaires de l’UE. Certains pays du voisinage de l’UE subissent également les conséquences négatives de cet environnement économique précaire. Le constat fait par l’UE se résume au fait que la croissance économique des pays en développement a atteint son niveau le plus bas depuis 2003. En outre, la multiplication des conflits en Afrique et dans les pays voisins de l’UE a été exacerbée par la crise économique mondiale. Ce qui s’est traduit par l’augmentation de la dette de ces pays et la limitation de l’accès aux financements de développement, quand bien même les besoins en investissement augmentent chaque année. La crise économique de 2008 a également généré une instabilité politique. Cela a conduit à une forte hausse de la migration difficilement maitrisable par l’UE et ses voisins. Ainsi, les tensions politiques et les mécontentements sociaux se multiplient dans les pays de l’UE au point de favoriser la montée en force des mouvements anti migratoires.

Ce partenariat permettra en conséquence de booster la croissance économique des pays d’Afrique et du voisinage de l’UE. La création d’emplois qui en découle offre l’opportunité de résorber les causes de la migration tout en impliquant davantage le secteur privé au financement de la croissance. L’UE espère ainsi attirer des investisseurs pour les pays africains fragiles. D’après les données de 2012, seulement 6% (34,6 milliards d’Euros) du total des investissements directs étrangers et les autres flux financiers sont allés effectivement aux pays en développement dits fragiles. Toutefois, 72% de ces investissements se concentrent sur dix pays africains les plus riches en ressources. En outre, depuis la crise économique de 2008, le coût de création d’une entreprise dans les pays fragiles est trois fois plus élevé que dans les autres. Cette vulnérabilité compromet durablement la relance de la croissance économique de ces pays et éloigne les financements directs étrangers.

Le PIE au cœur du développement durable et inclusif

Le plan d’investissement externe sera alimenté par des fonds de l’UE, la contribution des pays membres, d’autres bailleurs de fonds, celles des institutions financières et du secteur privé. Il est doté d’un fonds européen de 3,35 milliards d’euros jusqu’en 2020. Ce fonds devrait mobiliser jusqu’à 44 milliards d’euros supplémentaires et même plus de 88 milliards d’Euros si tous les Etats membres de l’UE libèrent en totalité leur contribution.

Le PIE vise à favoriser un développement durable et cohérent en mobilisant l’investissement et la levée de fonds. Ceci facilitera la fourniture de financements aux micros, petites et moyennes entreprises censées créer des emplois. Les fonds du PIE seront orientés vers les infrastructures (eau, énergie, transport), les technologies de l’information et des communications, l’environnement, les infrastructures sociales et le capital humain. Ces actions devraient attirer les investissements par la mise en avant de projets viables sur le plan financier, l’amélioration de l’environnement des affaires dans les pays partenaires de l’UE par le soutien aux réformes institutionnelles et à la gouvernance économique. Enfin, le PIE contribuera à attaquer les causes profondes des migrations et à renforcer les partenariats avec les pays africains et ceux du voisinage de l’UE dont les pays Balkans (Serbie, Croatie, Monténégro, etc.).

Pour ce faire, le PIE développera ses actions vers trois directions : mobilisation des investissements, intensification de l’assistance technique et amélioration de la gouvernance économique. La mobilisation des financements se fera à travers une nouvelle garantie du Fonds Européen pour le Développement Durable (FEDD) dont la composition sera axée sur deux plateformes régionales d’investissement dont l’une pour l’Afrique. Ces plateformes combineront à la fois des instruments de mixage existants et fonctionneront sur un système de guichet unique pour recevoir les propositions des institutions financières et d’autres investisseurs publics et privés. L’autre avantage du FEDD porte sur des garanties partielles aux institutions financières intermédiaires qui soutiendront le PIE en apportant un support à travers les prêts de garantie, de fonds propres ou de produits similaires aux bénéficiaires finaux. Les risques pour les investisseurs privés seront ainsi réduits et cela absorbera les pertes éventuelles encourues par les institutions de financement et les investisseurs du secteur privé.

L’assistance technique portera sur le contexte politique général. Il s’agira d’aider les pouvoirs locaux et les entreprises à développer beaucoup de projets durables, attrayants pour les investisseurs en y associant le secteur privé. Enfin, le troisième pilier concerne l’amélioration, en collaboration avec le secteur privé, de l’environnement des affaires, de la gouvernance économique et du contexte politique général. Il se déclinera en thématiques nationales et régionales retenues par l’UE en matière de coopération au développement. Dans ce cadre, l’accent sera mis sur la formation des ressources humaines à travers des cours, des séminaires, etc. L’objectif est de former des cadres d’entreprises privées et publiques à même de présenter des dossiers d’investissement répondant aux standards des banques et des institutions financières et présentant de garanties de rentabilité économique, financière et sociale.

Les entreprises privées au centre des propositions d’investissement

Les propositions d’investissement devront contribuer au développement économique et social durable avec un accent sur la création d’emplois, particulièrement en faveur des jeunes et des femmes. L’impact de ces investissements devrait se traduire par la lutte efficace contre la migration irrégulière.

Le nouvel instrument européen pour l’investissement direct en Afrique est une opportunité pour favoriser la croissance économique en panne dans les Etats africains fragiles. La crise économique en vigueur depuis 2008 a eu des répercussions énormes sur l’Afrique au regard de l’accroissement des conflits, de la hausse du chômage et du départ massif des jeunes vers l’Europe. Cette migration crée aussi bien pour l’Afrique que l’UE des déséquilibres sociopolitiques. Le Plan d’Investissement Externe apparaît alors comme une solution durable à la lutte contre la migration tout en améliorant la santé économique et financière des Etats africains. L’Afrique doit alors se saisir de ce nouvel instrument pour financer son développement économique durable et inclusif.

Banat Mamout

TC n°351 / Novembre 2016

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Par : Boutros

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