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Dialogue national inclusif : des mots à l’épreuve des maux

Dès le lendemain de la disparition du Maréchal du Tchad en avril 2021, les Tchadiens se sont levés, unanimes, pour demander à « aller au dialogue ». Seulement, personne ne savait clairement ce que cela signifiait. Dans le camp de ce qui était  « la majorité » de l’époque, c’est le branle-bas. Qui prendrait la relève du Maréchal ? Comment composer avec les nouveaux maîtres du pays ? Les militaires offriraient-ils assez d’espace d’expression politique aux civils ? Que deviendrait le parti présidentiel ? Des fissures se dessinent dans l’édifice. Les « mouvanciers » n’avaient pas non plus le cœur net. Dans l’accord de dupes qui les liaient au Mouvement Patriotique du Salut (MPS) où seuls les chefs profitaient, comment renégocier de nouvelles conditions d’une alliance profitable ?

Et les opposants traditionnels, qui sollicitaient depuis belle lurette le « dialogue inclusif » en vue de repartir de zéro avec le processus démocratique, se voient revigorés. Eux qui revendiquaient une démocratie débarrassée de ses excroissances militaires ne peuvent donner carte blanche à un Conseil Militaire de la Transition dont la composition ne rassure point. On s’oppose encore de toutes ses forces, en solo ou au sein d’un regroupement, jusqu’à l’apparition de certaines discordes qui aboutissent, généralement, au racolage avec l’ennemi de la veille.

Dans le camp des organes de la Transition, on multiplie les concertations avec les composantes de la société tchadienne : société civile, acteurs politiques (ancienne majorité et opposition), femmes, jeunes, personnes en situation de handicap, rebelles, etc. Ces derniers constituent même le goulot d’étranglement du processus de dialogue à cause de la difficulté à les circonscrire dans leur dénomination. Le plus intrigant dans ce processus, c’est que le Conseil Militaire de la Transition sollicite et suscite en sous-marin des soutiens. Manifestations de soutien et tournées politico-militaires se succèdent pour obtenir l’adhésion de la population au dialogue national. Pourtant, le « dialogue national inclusif » n’est qu’un mot, à notre avis. Comme la Conférence Nationale Souveraine (CNS) de 1993, dont l’initiative a été disputée par le pouvoir à la société civile et l’opposition politique, et dont on mesure aujourd’hui le résultat, le futur dialogue national inclusif montre tous les symptômes d’une pathologie identique.

Car, pendant que ces « libérateurs » de tous bords se disputent la légitimité de la conduite de ce futur dialogue, les maux dont souffrent les Tchadiens reprennent, chaque jour, du poil de la bête : famine, pandémie, endémie, appauvrissement continu des populations, cherté de la vie, concussion, détournements des deniers publics, injustice, impunité, insécurité, discrimination, etc. Les événements de ces derniers jours nous rappellent que les mots des hommes politiques n’ont aucun égal avec les maux sous le poids desquels ploient les populations. En l’espace de deux semaines, l’on a enregistré au moins 33 victimes d’affrontements (21 à Abéché entre les 24 et 25 janvier à Abéché, et 12 à Sandana dans le Moyen-Chari le 9 février). Point commun dans ces massacres : résolution partisane de conflits intercommunautaires. Le Conseil Militaire de la Transition est ainsi mis au défi de prouver sa capacité et sa bonne foi à réussir une transition qui mettrait désormais terme aux maux tchadiens !

Nestor H. Malo

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Nestor HINYANDIGUIM MALO

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